« April June... Avril et juin. » Son mois de naissance, et celui pour lequel sa naissance était prévue. Génial, niveau originalité non? Et rien que ce détail suffit à résumer les relations entre April et son père. C'est à se demander si elle existe à ses yeux, autrement que comme une bouche à nourrir. Elle a donc du se débrouiller seule. Aller en cours seule.
Une gamine solitaire, ce n'est pas allé en s'améliorant lorsqu'elle a vieilli. Tous ces adolescents, si stupides, si immatures, adorateurs des soi-disant « films » de vampires, de musique qui ressemble plus à du bruit ou a des mecs qui parlent qu'autre chose... Non, elle est loin de tout cela. Le collège et le lycée? Elle n'y est allée que pour avoir son diplôme, et essayer de faire quelque chose de sa vie. Mais pas question de s'y faire des amis. Et encore moins des amies. Après tout, la moitié des filles étaient des conquêtes de son père, c'est dire à quel point leur QI ne devait pas dépasser celui d'une huitre.
Son temps libre, elle le passait à piquer des films dans la vidéothèque de son père, à faire du sport toute seule, avec sa musique comme seule compagne, à surfer sur le net ou à jouer aux jeux vidéos.
Mais bien entendu, cette routine ne pouvait pas durer. Et c'est là que l'épidémie est entrée en jeu.
Après une nuit blanche passée sur Left 4 Dead, logique d'avoir quelques hallus et de prendre ses camarades de classe pour des zombies, non? Surtout qu'ils sont loin d'être réactifs et brillants en temps normal... Mais il fallait reconnaître que le sang qui coulait de leur bouche et les plaies béantes auraient mis la puce à l'oreille de n'importe quel abruti. Surtout que Halloween, c'était pas vraiment au même moment.
Son premier réflexe? Trouver la façon dont une chaise et un crâne de mort-vivant peuvent interagir. Et le résultat a été très probant, pour le coup. Deuxième réflexe? Se rendre compte que, même s'il y avait assez de chaises pour s'occuper de tous les élèves, le trente contre un n'était pas une solution viable.
Elle s'est donc enfuie, évitant les pièges classiques des films d'horreur (pour une fois que son père lui servait à quelque chose), récupérant provisions et armes de fortune sur le chemin...
Et c'est à ce moment là qu'elle a commencé à se sentir vivante. L'adrénaline de la fuite, de la survie, du combat... tout ça lui donne enfin ce qui manquait à sa vie : un but. Même s'il est aussi simple que « survivre ».

Smith. Un nom ordinaire pour quelqu'un qui est loin de l'être. Un jeune souvent qualifié de « dans les nuages » malgré son potentiel, il était la terreur des professeurs : l'élève qui ne suit pas, mais qui réussit à être premier de la classe. Celui qui dessine, lit ou écrit, mais répond aux questions lorsqu'on l'interroge.
Cela n'a bien entendu pas duré, David se contentant au final d'une place un peu au-dessus de la moyenne mais pas trop, sans vouloir se mettre en avant. Il n'aimait pas être le centre de l'attention. Même s'il est assez rapidement devenu celui de la gent féminine. Après tout, malgré son côté un peu fantaisiste, à toujours penser à son ordinateur ou à ses bouquins, il était loin d'être le plus moche des garçons de la classe.
Et cela continua à l'université, qu'il abandonna rapidement, lassé par le côté académique des cours. Pour s'amuser, il tenta de hacker le réseau du commissariat du coin. Puis celui du commissariat central. Puis, puisque le reste n'avait plus d'intérêt, celui du FBI. Autant dire que, si les premiers étaient bien passés, le dernier ne fut pas aussi discret. Et même si les forces spéciales passèrent près de trois mois à le traquer pour le retrouver, ils finirent par lui mettre la main dessus.
Mais, au lieu de l'arrêter, ils lui proposèrent un poste en freelance : son travail serait d'attaquer leurs réseaux, de voir jusqu'où il pourrait aller sans être repéré, puis de faire son rapport sur les failles qu'il avait exploité, afin de renforcer la défense des systèmes.
Sauf qu'un jour, il vit quelque chose qu'il n'aurait pas du voir. Des vidéos ou des documents compromettants, une révélation dramatique... Il n'en a jamais parlé. Mais cela a suffit à le faire renvoyer, ses employeurs considérant qu'il avait « rompu la clause de confidentialité ». Heureusement pour lui, ils n'avaient pas très envie d'amener ça jusqu'au tribunal, et ils se contentèrent de le condamner au chômage. Chose qui lui convenait amplement.
Il était toujours au chômage lorsque l'invasion a éclaté. Première réaction? Croire que c'était un mauvais rêve, qu'il avait mal supporté la fiesta de la veille... Puis lorsque le premier zombie l'attaqua vraiment, il réalisa que ce n'était pas un rêve.
Par chance autant que grâce à sa musculature développée pendant ses années d'ennui, il réussit à s'en tirer.
La vraie question était : que faire maintenant?

James Carter a toujours été quelqu'un de bien, toujours. Jusqu'au fameux jour où, eh bien, ça s'est mal passé sur notre bonne vieille terre et où il s'est retrouvé à devoir subir la mort affreuse de ses parents et de sa jeune soeur, bouffés par des créatures que même le bon Dieu n'aurait pas su nommer... Enfin bref. C'était des gens biens, ses parents, tous deux enseignants et ils lui avaient inculqué le sens des valeurs, de la justice, des principes moraux solides. Et puis ils n'avaient jamais manqué de rien, sa soeur Kimberly et lui-même. Vivre dans le Queens, jusqu'ici, c'était chouette.

Sa copine sous le bras, il prend sa voiture et oublie pendant trois quarts de seconde qu'il était encore jusqu'à présent l'associé d'un éminent avocat New-Yorkais et que c'était quand même une sacrée aubaine que de bosser dans ce foutu cabinet. Mais pourquoi ce cabinet ? Pourquoi sa maison ? Pourquoi sa voiture ? Pourquoi repenser à tout ça ici et maintenant ? A quoi cela rime ?
A rien... plus rien ne rime à rien... et James le sait bien alors qu'il caresse du doigt la détente de son fusil à canon scié. Une belle arme, pour sûr...
Plus rien n'a d'importance...

Aahh, son Irlande natale manque beaucoup à Liam mais fallait s'avouer une chose : on ne se marrait pas autant qu'en Amérique et les filles étaient moins bien roulées ! Arrivé à l'âge de vingt-cinq ans à San Francisco pour intégrer le poste de professeur en, je cite, "art cinématographique", s'il vous plaît -papa producteur de film, ça aide !- Liam s'est très vite acclimaté à son nouvel environnement, aux fêtes estudiantines, aux balades sur la plage à 3 heures du matin et défoncé comme pas deux, au dîner romantique se terminant sous la couette et à tout un tas d'autres choses super chouettes Made in USA !

Cependant, il était loin de se douter qu'en allant donner cours ce matin ses élèves ressembleraient à de purs produits de l'industrie de Romero. Ils les savaient complètement mous du bulbes mais à ce point-là... Bah ils sont aussi frais que s'ils l'avaient eu quatre heures sur une chronologie des films de Bergman ! C'est dire...
De ce fait, Liam n'a pas perdu son temps. Il s'est planqué dans le gymnase et, devinez sur qui il est tombé ? Oui, dans le mille, quelques uns de ses élèves venus se barricader puis... deux ou trois guignols inscrits en... arts... plastiques -sut tant est que cette matière soporifique puisse encore exister. Attendez ! 70 % de filles dans ce groupe qu'il mène d'une main de maître, ça valait le coup, non ?

Aujourd'hui, s'ils ont pris d'assaut le bureau du recteur, c'est grâce à lui ! Eh oui ! Qui peut se vanter d'avoir encore dans la tête toute la filmographie des films de zombies de leur création à nos jours ? Il sait comment les combattre et sait aussi exactement où frapper. Comme quoi, la télévision, ça n'a pas eu QUE du mauvais sur son éducation !